ben voilà la réforme des retraite est passé aussi pour les députés
Faites ce que je vote, pas ce que je fais. Ou comment les députés, contraints de réformer leur régime (très) spécial de retraites, ont accepté hier de l’aménager, mais sans renoncer totalement à leurs avantages. Une réforme approuvée par l’ensemble des partis représentés au bureau de l’Assemblée, à l’exception du Vert François de Rugy.
Mesure phare qui existait jusqu’ici pour les représentants du peuple: le système de double cotisation lors des trois premiers mandats, puis d’un et demi sur le suivant. Celui-ci permettait aux députés de cotiser 22,5 ans pour une retraite complète, contre plus de 40 ans aujourd’hui pour le commun des mortels. Avec la réforme, les députés ne pourront plus cotiser «que» 1,5 fois sur les deux premiers mandats, 1,33 sur le suivant, puis 1,25 sur ceux d’après. «Un effort de réforme sans précédent», selon le cabinet de Bernard Accoyer, président de l’Assemblée nationale. Et qui conduira à amputer les retraites de 25%.
En réalité, même réformé, le régime restera très confortable. Ainsi, au bout d’un mandat, un député sera encore assuré de toucher une pension de près de 1200 euros (contre 1600 euros auparavant). Soit une retraite obtenue en cinq ans quasi équivalente au montant de la pension médiane touchée par les Français (1334 euros) après une carrière complète (près de 40 ans de cotisation). Et si le député fait un second mandat, il touchera alors le double (2400 euros, au lieu de 3200 euros auparavant). Pour faire taire les critiques, l’Assemblée insiste sur le fait que le mandat moyen d’un député est de 7,5 ans. Ce qui fait tout de même une retraite moyenne de 1800 euros après 7,5 années de cotisations…
Pas de décote pour les députés
Un rendement imbattable, rendu possible grâce à la surcotisation ouvrant droit à une majoration d’annuités, mais également par le fait que les députés ne sont pas soumis au dispositif de la décote. Pour un salarié lambda, par exemple, la retraite sera proportionnelle au nombre d’annuités cotisées, mais aussi amputée d’une décote de 5% par année manquante (dans la limite de cinq ans). Pour les députés, pas de décote, la pension est calculée au prorata du nombre d’années effectuées. Argument de l’Assemblée: leur système n’étant intégré à aucun autre, leurs années ne comptent pas dans la reconstitution finale de la carrière. Sauf à faire 31 ans de mandat pour une carrière complète, tous seraient soumis à la décote. Et devraient attendre l’âge d’annulation de celle-ci que la nouvelle loi sur les retraites a justement repoussé à 67 ans.
Reste que ce système, même réformé sur d’autres points (suppression du 13e mois, recul de l’âge légal, alignement du taux cotisation sur celui du privé), demeure sans doute le plus lucratif de tous les régimes spéciaux. Mais l’écrire, «c’est être accusé d’antiparlementarisme primaire», glisse un député frondeur. Pour le patron du groupe UMP, Jean-François Copé, c’est même «un bon accord, équilibré, qui nous rapproche singulièrement du régime général». Ne reste plus, alors, qu’à aligner le régime général des salariés sur celui des députés…