C'est un engagement que Nicolas Sarkozy avait fait au début de son quinquennat : réduire la mortalité routière et parvenir "sous la barre de 3 000 morts par an à la fin de la mandature". L'objectif ne sera pas atteint. Le baromètre de septembre de l'Observatoire national interministériel de la sécurité routière décomptait déjà 2 993 tués, à trois mois de la fin de l'année. La mortalité routière en septembre est même en hausse de 0,4 % par rapport au même mois de 2010, une première depuis 2001, année depuis laquelle la mortalité sur les routes de France n'avait cessé de décliner.
7 720 MORTS EN 2001
C'est en 2002 que le président Chirac fait de la sécurité routière une priorité. Dans l'année qui suit cet engagement, le Parlement adopte, en juillet 2003, une nouvelle loi aggravant les peines de prison en cas d'homicide ou de blessures, renforçant la répression des infractions, les contrôles ainsi que le nombre de radars. Le résultat est significatif : 7 720 personnes sont mortes suite à un accident de la route en 2001. La France est alors l'un des pays de l'Union européenne où la mortalité routière est la plus élevée, avec un taux de 138 tués par million d'habitants.
Dix ans plus tard, le pays a presque divisé par deux le taux de tués par million d'habitants (67,7). Un chiffre légèrement inférieur à la moyenne européenne. De cancre européen, la France se rapproche du premier tiers de la classe en se positionnant, en 2009, au onzième rang parmi les 27 Etats membres. Il demeure néanmoins que 3 992 personnes sont mortes en 2010 suite à un accident de la circulation.
Malgré cela, les Français seraient majoritairement favorables à un assouplissement du permis à points. Une étude d'opinion réalisée par Infraforces pour Autoplus souligne en novembre 2010 que 87,4 % des sondés souhaitent une règlementation moins dure. Trois mois plus tard, en février 2011, une poignée de parlementaires obtiennent, dans le cadre de la loi Loppsi 2, un net allègement des contraintes du système de permis à points. Les délais de récupération automatique sont ainsi passés de trois à deux ans en cas de retrait de plusieurs points, et d'un an à six mois pour les infractions à un seul point en cas de conduite sans infraction.
HAUSSE DE LA MORTALITÉ EN AVRIL
En avril, la forte hausse de la mortalité routière ( + 19,9 % ) fait l'effet d'un coup de tonnerre au sein du gouvernement. Le sujet géré jusqu'alors par la déléguée interministérielle à la sécurité routière, Michèle Merli, est saisi par le premier ministre. François Fillon convoque le 11 mai un comité interministériel exceptionnel en présence des principaux ministres concernés – Xavier Bertrand (travail), Claude Guéant (intérieur), Nathalie Kosciusko-Morizet (écologie) et Thierry Mariani (transports) .
A l'issue de cette réunion, Matignon annonce une série de mesures parmi lesquelles la suppression des panneaux indiquant la présence de radars fixes, l'interdiction des avertisseurs de radars, le déploiement de 1 000 nouveaux radars d'ici à la fin de l'année 2012 ou encore le renforcement des sanctions pour l'usage d'un téléphone au volant.
Six jours plus tard, le 17 mai, de nombreux députés affichent leur opposition aux annonces gouvernementales à l'Assemblée nationale. A la réunion du groupe UMP, ils sont plusieurs dizaines à s'enflammer contre le premier ministre et dénoncent un manque de concertation du gouvernement avec les élus.
Jean-Marc Roubaud, député du Gard, menace de "se suspendre de l'UMP" si ces mesures ne sont pas... suspendues. "Vous ne savez plus quoi inventer", se plaint Yves Albarello, élu de Seine-et-Marne, pour qui les images télévisées des premiers panneaux démontés ont eu un effet "désastreux". "Pendant tout le week-end, je me suis fait insulter", relatet-il.
"On n'arrête pas de s'en prendre plein la gueule", renchérit Richard Mallié (Bouches-du-Rhône), dénonçant une précipitation "inacceptable". Chacune de ces interventions est ponctuée par une salve d'applaudissements, tandis que M. Fillon, à la tribune, ne dissimule pas son énervement .
RECUL DU GOUVERNEMENT
Le 23 mai, 70 députés UMP adressent une lettre de protestation au premier ministre dans laquelle ils lui font part de la "profonde exaspération" des Français contre les dernières mesures annoncées par le gouvernement pour lutter contre la hausse de la mortalité routière. Fatigué de la cacophonie de la majorité sur cette thématique, le gouvernement recule. Le 25 mai, la majorité crée une mission d'information sur l'analyse des causes d'accidents de la circulation.
La mission doit rendre son rapport jeudi 20 octobre. Elle préconise notamment le renforcement de l'autodépistage de l'alcool, du déploiement des radars, une tolérance "zéro alcool" pour les conducteurs novices et une répression plus sévère des grands délits liés à l'alcool.
La mission recommande également une plus grande tolérance pour les excès de vitesse en suggérant d'"adapter la répression de la vitesse à l'accidentologie". Les parlementaires sont favorables à une simple amende de 135 euros, sans retrait de points, pour les excès de vitesse de moins de 10 km/h sur autoroute et voie rapide quand cette infraction n'a pas été commise depuis six mois.
Pourtant, le rapport 2010 de la sécurité routière soulignait que pour les 3 706 accidents mortels recensés, " la vitesse reste toujours la cause majeure de la mortalité routière ". Le nombre de vies sauvées en 2010, si les limitations de vitesse avaient été respectées, est évalué par la sécurité routière à 717.
http://www.lemonde.fr/politique/article/2011/10/19/l-annee-2011-met-un-terme-a-dix-ans-de-baisse-de-la-mortalite-routiere_1590495_823448.html#xtor=AL-32280515