Bien sur que la vie est belle. Bien sûr que c'est pas beau les accidents. Bien sûr que je déplore ce qui est arrivé à tes jumelles et à ton ami. Bien sûr que les Français ont parfois des comportements accidentogènes. Bien sûr....!
Mais pour reprendre ton titre, quel amalgame! Rapporter de tels constats, qui sont humainement inacceptables, et les juxtaposer en faisant l'apologie de la sanction-répression, celà reste à mon sens de la solution facile.
Les propos qui suivent n'engagent que moi.
Je partage, je le ré-écris, ce ressenti devant le caractère inacceptable des accidents de la route. D'autant plus inacceptable si l'on est touché dans sa chair comme c'est ton cas. Mais en observant la problématique dans un regard un brin plus large que l'émotion légitime suscitée, on va nécessairement faire deux constats. Voire trois.
Le premier, c'est que dès qu' il y a circulation, trajectoires, objets en mouvements, il y aura des accidents. C'est une constante, une évidence aussi naturelle que le caractère inéluctable de la mort de chacun (et c'est d'ailleurs ce que l'inconscient collectif du 21ème siècle a de plus en plus de mal à accepter: la mort est aussi naturelle que la vie. De fait, l'idée de mort nous choque de plus en plus, revêt un caractère catastrophique). Donc le zéro morts sur la route, c'est le même fantasme édulcoré que le zéro morts à la guerre: bienvenue dans la réalité, le Monde des Bisounours c'est à la télé.
Deuxième constat. Répression, à défaut d'éducation, mais aussi et surtout de responsabilisation. Ce n'est pas la fin des libertés que je blâme, c'est la déresponsabilisation croissante galoppante. La punition à coup sûr, le baton et la carotte. 400 000 ans d'histoire humaine à chaque jour aprendre un peu plus, marcher un peu plus debout, apprendre à faire face, pour qu' au détour d'un début de 21ème siècle finisse le Monde Ancien (comme l'a décrit Adler) dans l'effondrement de deux tours, donnant le départ à l'allaitement collectif institutionalisé à la glande mamaire universelle de la bien pensance, faisant de chaque individu sortant du rang un danger en puissance. Grace à la bienveillance collective, l'asseptisation universelle, le fort et le faible auront le même avenir. Celui qui ose aura le même horizon que celui qui n'ose pas, le même air conditionné, les mêmes antibiotiques. C'est le glas de la pensée, de la découverte. C'est le glas de l'élan. "Il n'y aura plus de charge au clairon sur le fleuve", il n'y aura plus d'Hemmingway. C'est ce modèle de pensée, monolythique, que je condamne. C'est un tout, navrant, désolant.
Je te statistique tout çà, je mets un ruban et je l'enfonce avec un peu de beurre, je journal télévisé souriant qui va bien, et zou! Pondu mon modèle de pensée universelle, le bien et le mal enfin bien tranchés, mieux que dans les livres sacrés. Et gare à l'infidèle qui marchera en dehors des clous, on le brûlera sur deux générations en endettant sa descendance. Avant que celà aussi devienne une institution.
Et si je devais ajouter un troisième volet, plus pragmatique, c'est qu' une fois de plus on nous raconte des conneries, dont même toi Pachy, qui pourtant n'es pas si bête, te trouves à faire l'apologie, acceptant la sanction pécunière, sachant pertinament que le nombre de conducteurs sans assurance ni permis va nécessairement exploser (parce qu'on est Français, pas Bataves ou Tetons, et qu' on roulera sans permis, c'est notre coté Berlusconi). Et qu' à terme, cela fera des malheureux.